Article paru dans le journal LE MESSAGER du 25 juin 2020
Un cabinet d’avocats thononais gère actuellement une dizaine de dossiers de litiges entre des hôteliers-restaurateurs du chablais et leur compagnie d’assurances. En cause : le refus de ces dernières de les indemniser suite aux pertes financières engendrées par la crise sanitaire.
Membres du cabinet MERMET & ASSOCIÉS, Maîtres Quentin Mugnier et Frédéric Noetinger-Berlioz conseillent une dizaine d’hôteliers-restaurateurs du chablais en conflit avec leur compagnie d’assurance. « Les compagnies d’assurances vous donnent un parapluie quand il fait beau et vous l’enlèvent quand il pleut. » voici comment, de manière très imagée, maître Frédéric Noetinger-Berlioz résume la situation dans laquelle se retrouvent un grand nombre de commerçants qui, malgré un important manque à gagner engendré par la crise sanitaire, ne peuvent compter sur leur assureur. Et ce malgré la souscription d’un contrat contre les pertes d’exploitation. aidé de son confrère, Maître Quentin Mugnier, l’avocat thononais étudie actuellement une dizaine de demandes, émanant essentiellement d’hôteliers et de restaurateurs chablaisiens qui, à l’image de Thomas Mugnier ont été contraints de fermer leur établissement durant le confinement. Une fermeture qui se traduit naturellement par un chiffre d’affaires égal à zéro.
Pourquoi les compagnies d’assurances refusent-elles de payer ?
Si certains contrats indiquent clairement que l’assuré n’est pas couvert pour une perte d’exploitation en cas d’épidémie, dans la plupart des cas, les choses sont beaucoup plus complexes. « Certains contrats sont sujets à interprétation », souligne Me Noetinger-Berlioz. L’interprétation qu’en font les compagnies d’assurance est alors généralement effectuée en leur faveur. Elles sont en effet conscientes qu’accepter de couvrir les pertes d’exploitation en cas d’épidémie pour un assuré « ouvrirait la boîte de Pandore » et les obligerait à indemniser un grand nombre de commerçants et de chefs d’entreprise dont les pertes sont souvent conséquentes.
Mais si, à la question de l’indemnisation, « certains assureurs répondent tout de suite non, d’autres acceptent de donner 5 000 ou 10 000 euros » relève Me Noetinger.
Quels sont les leviers disponibles pour les faire payer ?
Une clause trop ambiguë, des exclusions de garantie qui ne sautent pas aux yeux… : les avocats peuvent notamment s’appuyer sur différents vices de forme pour donner raison à leurs clients. Ainsi, les exclusions doivent être écrites « en caractères très apparents. Or dans certains contrats, ce n’est pas le cas », souligne Me Mugnier. En clair, les causes d’un sinistre qui ne sont pas garanties doivent être précisées en gras ou dans un encadré (ou les deux) mais pas noyés dans le corps du contrat. De même que les clauses doivent être immédiatement compréhensibles. Me Noetinger évoque ainsi cette phrase d’un contrat qu’il a « relu 3-4 fois » avant de la soumettre « à une linguiste agrégée de lettres modernes ». Et l’avocat de rappeler que « le doute profite toujours à l’assuré ».
Où en sont les procédures ?
Pour l’heure, « nous n’avons débuté aucune procédure. Nous sommes dans la phase de discussion avec l’assureur ou de déclaration de sinistre », précise Me Mugnier. En cas de procédure, deux possibilités : soit la saisie du juge des référés du tribunal de commerce « s’il n’y a pas de contestation sérieuse, ce qui est rare » mais qui a l’avantage d’être rapide ; soit la saisie du juge au fond, privilégiée par le cabinet thononais. Inconvénient de cette procédure : en cas de victoire, l'assuré ne sera pas indemnisé avant au moins un an.